L’horlogerie suisse est-elle en danger avec les droits de douanes de 39% de Trump ?

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Fin juillet, je vous parlais de la mauvaise santé de l’horlogerie au premier semestre 2025 et des risques qui pouvaient arriver, provenant surtout des taxes douanières américaines. L’administration Trump n’a pas attendu longtemps avant d’enfoncer l’industrie horlogère suisse un peu plus dans la crise avec une taxe douanière de 39 %, bien plus importante que celle pour l’UE (15 %) ou le Royaume-Uni (10 %).

Mais alors, quelles vont être les conséquences concrètes pour les principales marques et groupes helvétiques ?

Une annonce qui fait mal

Le 1er août 2025, Donald Trump annonce que la Suisse va subir des droits de douane de 39 %, bien supérieurs à ce que s’attendait l’industrie suisse, et cela le jour de la Fête nationale suisse !

Le choc a été rude pour l’ensemble de la Suisse, mais plus particulièrement pour l’industrie horlogère, tout simplement car les marques de montres suisses comptaient beaucoup sur le marché américain pour remplacer la Chine (toujours en baisse) et porter la croissance du secteur. Il faut voir que, sur le premier semestre, les USA ont représenté des exportations de 2,5 milliards de francs suisses (grâce aussi au surstockage pour prévenir des droits de douane), soit le premier débouché au niveau des pays (l’UE est légèrement devant à 2,8 milliards de CHF et la Grande Chine suit avec 1,8 milliard de CHF).

D’ailleurs, au niveau économique, UBS prévoit même un impact négatif de 0,4 % du PIB pour la Suisse sur 4 trimestres avec des droits de douane de ce niveau. De nombreux emplois seront menacés, surtout dans l’industrie horlogère (environ 20 000 emplois), comme l’annonce Economiesuisse.

Selon les premières études, les plus touchés seraient essentiellement Swatch Group et Rolex, car l’entièreté de leurs productions est suisse, alors que Richemont, qui est présent dans le luxe (mode et joaillerie) et produit aussi en France et en Italie, devrait être moins impacté. Les marques indépendantes devraient elles aussi subir un gros coup de frein sur leurs ventes.

Au niveau des produits, il semble que les montres d’entrée et de moyen de gamme seront plus touchées que celles à plusieurs dizaines de milliers d’euros. On peut donc se dire que les marques de Haute Horlogerie, aux produits très rares et achetés par des passionnés collectionneurs, seront légèrement moins impactées que des marques comme Tissot, Longines, Tudor, Omega ou même Rolex.

Mais que peut faire l’industrie horlogère suisse ?

Aujourd’hui, les horlogers ont sans doute assez de stock pour quelques mois ou semaines, mais que va-t-il se passer ensuite ? Il faudra forcément augmenter les prix et rogner sur les marges, mais rares seront les marques qui seront prêtes à accepter de prendre à leur charge 39 % de droits de douane.

On peut donc s’attendre à voir les prix des montres augmenter aux États-Unis de 10 à 20 %. Cependant, l’élasticité des prix a sans doute été atteinte à cause des hausses de prix régulières depuis 2 à 3 ans, qui ont déjà provoqué des cassures entre les amateurs de montres et les marques.

Les marques suisses vont devenir de moins en moins concurrentielles par rapport aux horlogers japonais (taxés à 15 %), mais aussi allemands et français (15 % aussi) ou anglais (10 %). Les ventes de montres suisses risquent donc de diminuer pour partir chez d’autres concurrents d’autres pays…

On peut ensuite se poser la question de localiser la production aux USA, mais est-ce possible facilement pour une industrie comme l’horlogerie ? La réponse est tout simplement non, car il faut de gros investissements et une main-d’œuvre compétente.

Les maisons suisses n’ont donc pas beaucoup de solutions, si ce n’est espérer une diminution des droits de douane en échange de contreparties du gouvernement suisse. Il faut aussi que les marques repensent leur stratégie marketing, pour ne pas oublier la “vieille Europe” qui, même si elle était moins dynamique que l’Asie, le Moyen-Orient ou les États-Unis ces dernières années, représente encore presque un tiers du marché horloger et est globalement stable ou en légère hausse depuis plusieurs années. Cependant, pour cela, il faudrait ressortir des produits qui conviennent mieux aux Européens et donc un peu moins chers…